L’ampleur du phénomène a de quoi surprendre tant il est peu habituel. Pour le troisième mois consécutif, la collecte nette en assurance-vie est négative. Pis, la décollecte est presque deux fois plus importante en novembre qu’en octobre. La différence entre les primes engrangées et les prestations versées par les assureurs-vie (qui incluent les retraits du fait des clients) est négative de 3,2 milliards d’euros, après une décollecte de 1,4 milliard en octobre et de 1,8 milliard en septembre. Les encours s’établissent à 1.370 milliards d’euros à fin novembre. Il s’agit là d’une première historique depuis que la Fédération française des sociétés d’assurances (FFSA) publie ces données mensuelles. Ce montant n’est pas sans rappeler celui d’octobre 2008 (- 3,1 milliards d’euros), mais la collecte s’était alors redressée le mois suivant avant d’être de nouveau négative, pour la dernière fois, en décembre. La FFSA se veut rassurante. D’une part, parce que les cotisations versées restent « substantielles dans un contexte général de ralentissement de l’épargne des Français depuis août 2011 ». Les versements atteignent 8,2 milliards d’euros en novembre et 115 milliards d’euros depuis le début de l’année. La FFSA note, d’autre part, que, au cours des onze premiers mois de 2011, la collecte nette est restée positive de 14,4 milliards d’euros. Rehaussement des prestations La fédération y voit d’abord des raisons structurelles qui poussent les assureurs à verser davantage de prestations. « Il faudra s’y habituer. La tendance sera à un rehaussement des prestations en raison du vieillissement de la population », indique Bernard Spitz, président de la FFSA. La fédération ne conteste par l’effet de la crise, mais nie une quelconque défiance envers l’assurance-vie. «La confiance envers l’assurance-vie n’est pas entamée. Les chiffres montrent simplement que les gens font des choix par rapport aux contraintes qui se posent à eux dans un contexte de crise économique », assure le président. « Nous sommes au début d’une croissance nulle en France, voire négative. Les comportements de consommation des ménages mettent un peu de temps à s’adapter et, en attendant, les gens ponctionnent sur leur épargne », explique un assureur. En outre, les retraits sont plutôt encouragés par les taux des contrats en euros, en baisse par rapport à l’an dernier, autour de 3 %. Les assureurs se veulent néanmoins optimistes. « Les besoins des souscripteurs en épargne longue de capitalisation restent réels avec l’allongement de la durée de vie », assure Pierre de Villeneuve, directeur général délégué de BNP Paribas Cardif. « Une des sources de la décollecte actuelle devrait s’estomper en début d’année, lorsque les gens verront concrètement la garantie en capital apportée sur leurs contrats en euros », ajoute même Jérome Grivet, directeur général de Crédit Agricole Assurances. Reste à savoir si cela sera suffisant pour estomper les effets de la crise économique. RÉJANE REIBAUD