L’avenir de CNP Assurances agite de nouveau le landernau financier. Alors que le premier assureur-vie français est en train de remettre à plat ses relations commerciales avec ses deux grands réseaux distributeurs, les Caisses d’Epargne et La Banque Postale, qui sont aussi ses actionnaires aux côtés de la Caisse des Dépôts (CDC), il suscite de nouveau les convoitises. Selon nos informations, l’assureur mutualiste Groupama cherche ainsi à promouvoir un projet de rapprochement avec CNP, qui passerait par la mise en commun de toutes leurs activités dans l’assurance de personnes.

Officiellement, le dossier n’est pas ouvert. Aucune négociation n’est d’ailleurs en cours entre les différentes parties, notamment la CDC, qui est la clef de voûte de l’évolution éventuelle du capital de CNP, dont elle contrôle plus de 40 %. Mais banquiers, conseils et avocats travaillent déjà sur différents schémas financiers. Et Thierry Martel, le directeur général de Groupama, qui aurait obtenu le feu vert de son conseil d’administration pour mener cette réflexion, a déjà testé son projet auprès de l’Elysée et de Bercy.

 
 

Son ambition ? Créer un grand groupe mutualiste mieux équilibré entre l’assurance-dommages et l’assurance-vie. Il envisagerait ainsi de fusionner les activités de Groupama Gan Vie avec celles de CNP, au sein d’un pôle contrôlé par Groupama SA et la CDC. Ses arguments ? La réforme prudentielle « Solvabilité II » pousse le secteur à se consolider et les acteurs à diversifier leurs activités. Un tel groupe serait plus puissant pour servir plusieurs réseaux – les clients de La Poste, de Groupama et de Gan – au moment où se profile le retrait des Caisses d’Epargne. Et un montage sous forme d’apport d’actifs ne nécessiterait pas de sortie de cash, ni pour les caisses de Groupama ni pour les actionnaires de CNP.

Groupama et CNP Assurances se connaissent bien. L’assureur avait regardé le dossier en 2007-2008, quand la renégociation des relations commerciales de CNP avec ses distributeurs avait (déjà !) éveillé les appétits des grandes compagnies françaises de la place. Groupama avait alors imaginé de s’allier à AXA pour scinder l’assureur-vie en deux. Quand, il y a deux ans, le groupe mutualiste avait essuyé de graves difficultés financières, c’est CNP qui avait été sollicité cette fois pour voler à son secours. Par ailleurs, l’assureur vert est partenaire de La Banque Postale pour ses produits d’assurance-dommages.

Groupama n’a pas souhaité faire de commentaires. Ses ambitions pourraient néanmoins se heurter à plusieurs écueils. Notamment à celles de… La Poste, qui espère elle aussi monter au capital de CNP, et doter ainsi sa filiale bancaire d’une compagnie d’assurance-vie (« Les Echos » du 1er août). BPCE indique de son côté qu’il « souhaite rester un actionnaire de long terme » de l’assureur. Dans l’entourage de CNP, on souligne enfin que le sujet n’est pas de substituer un réseau de distribution à un autre, mais de diversifier l’offre vers des produits de risques plus rentables, comme la prévoyance, et de trouver de nouveaux canaux de ditribution, qu’ils soient physiques, comme avec Santander dans l’assurance-emprunteur en Europe, ou virtuels.

« La décision reviendra quoi qu’il en soit aux actionnaires, indique un bon connaisseur du dossier. Plusieurs schémas circulent aujourd’hui, mais le dossier, complexe et technique à de nombreux points de vue, pourrait très bien se terminer par un statu quo pour quelques années encore. » Une chose est sûre, cependant, l’initiative de BPCE a clairement rebattu les cartes pour la CNP. 

Guillaume Maujean, Les Echos