LAURENT THÉVENIN
LE SUPERVISEUR DU SECTEUR ESTIME QUE LA BAISSE DES TAUX SERVIS SUR LES FONDS EUROS EN 2015 N’A PAS ÉTÉ SUFFISANTE. VILLEROY DE GALHAU INCITE DE NOUVEAU « À LA MODÉRATION ET AU RÉALISME » VU LE NIVEAU DES TAUX D’INTÉRÊT.
L’étreinte ne se relâche pas. L’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) a une nouvelle fois fait passer le message qu’il était nécessaire, vu la persistance de taux d’intérêt ultra-bas, de baisser encore la rémunération des contrats d’assurance-vie en euros. Vendredi, à l’occasion d’une conférence organisée par la Fédération française de l’assurance (FFA), François Villeroy de Galhau, gouverneur de la Banque de France et président de l’ACPR, a ainsi demandé aux assureurs« de faire preuve de modération et de réalisme » dans la fixation des taux de rendement qu’ils serviront au titre de 2016.

Une situation délicate
Les fonds euros – composés pour l’essentiel d’obligations publiques ou privées – rapportent de moins en moins depuis des années. En 2015, le rendement moyen est ainsi tombé à 2,27 %, contre 2,54 % au titre de 2014, selon les statistiques de l’ACPR. Mais cette baisse « reste encore insuffisante », selon François Villeroy de Galhau, alors que le taux de l’OAT à 10 ans a, lui, nettement plus reculé dans le même temps (- 81 points de base). De fait,« le contexte de taux bas exerce une pression sur la rentabilité des organismes : il conduit à une situation où les rendements des titres entrant en portefeuille sont inférieurs aux taux servis sur les polices d’assurance », souligne-t-il. La situation devient d’autant plus délicate pour les compagnies que ces contrats en euros offrant la garantie du capital à tout moment continuent de drainer l’essentiel de la collecte d’assurance-vie.

Sujet de préoccupation numéro un des assureurs-vie, l’environnement de taux bas actuel« impose une responsabilité collective renforcée », selon Bernard Spitz, le président de la FFA.« Celle-ci doit conduire l’ensemble des assureurs à adopter une attitude prudente », affirme-t-il. Dans cette optique, le secteur planche sur la création d’une nouvelle provision« pour rendements futurs suffisante pour lisser dans la durée les rendements servis aux assurés ».

François Villeroy de Galhau est, par ailleurs, monté au créneau pour défendre le bien-fondé des mesures conservatoires concernant l’assurance-vie inscrites dans le projet de loi « Sapin II ». Il est prévu de donner au Haut Conseil de stabilité financière (HCSF) la possibilité de restreindre ou de bloquer temporairement les rachats effectués par les détenteurs de contrat d’assurance-vie en cas de menace majeure sur la stabilité du système financier. Cette disposition a déjà fait couler beaucoup d’encre et suscité les protestations de l’Afer, première association d’épargnants française (voir « Les Echos » du 7 octobre).« La polémique sur ce sujet est inutile […].Je vous le dis avec fermeté : il n’y a aucune menace sur l’épargne des Français, il n’y a aucune remise en cause des contrats des assurés », tranche le président de l’ACPR.« L’unique objectif de cette mesure est de pouvoir protéger l’épargne des Français en cas de circonstances graves et exceptionnelles menaçant la stabilité financière. Si jamais cela devait s’avérer nécessaire, nous saurions en faire bon usage, dans l’intérêt de tous », assure-t-il.

Pour ses promoteurs, une telle mesure doit permettre d’éviter qu’en cas de remontée brutale et forte des taux d’intérêt les épargnants ne retirent massivement les sommes placées sur leurs contrats d’assurance-vie pour aller les réinvestir dans des placements mieux rémunérés. Un tel scénario pourrait en effet mettre à mal les compagnies d’assurances.
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