La tension est à son comble dans l’univers de la protection sociale complémentaire. Le gouvernement est en effet sur le point de déposer un amendement au projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) qui pousserait les entreprises à s’assurer en santé ou en prévoyance (décès, invalidité, incapacité) auprès d’un organisme recommandé par leur branche professionnelle. Comme Marisol Touraine, la ministre des Affaires sociales, l’avait annoncé, il s’agit de réécrire l’article L. 912-1 du Code de la Sécurité sociale que le Conseil constitutionnel a invalidé avant l’été.

Réaffirmée vendredi par l’institution, cette dernière décision retentissante a mis à bas la possibilité pour une branche professionnelle d’utiliser les clauses dites « de désignation ». Lesquelles permettaient d’imposer à l’ensemble des entreprises qui la composent un assureur unique pour leur régime de prévoyance ou de frais de santé.

Pour le gouvernement, il est au contraire nécessaire que la prochaine généralisation de la complémentaire santé d’entreprise puisse s’appuyer sur une mutualisation la plus large possible au niveau de la branche. Pour orienter le choix des entreprises, l’exécutif veut, selon nos informations, se servir du forfait social – qui est prélevé sur les rémunérations ou les gains non soumis aux cotisations sociales. Ce dernier resterait à 8 % pour celles qui opteraient pour l’assureur recommandé par la branche. Il passerait en revanche à 20 % pour celles qui iraient s’assurer ailleurs.

En outre, les TPE de moins de 10 salariés qui ne suivraient pas la préconisation de leur branche seraient à leur tour assujetties à un forfait social de 8 % alors qu’elles en sont actuellement exonérées. Avec un différentiel aussi élevé, le calcul serait vite fait pour la majorité des employeurs.

Les acteurs qui se sont battus contre les clauses de désignation sont vent debout contre une telle solution. « Ce dispositif serait très contestable. Les mots et les procédés sont différents, mais cela reviendrait à faire quasiment la même chose qu’auparavant », objecte Patrick Petitjean, le président de l’Association pour la promotion de l’assurance collective (Apac). « Le Conseil constitutionnel a réitéré vendredi sa censure des clauses de désignation. Des amendements au PLFSS sont pourtant annoncés, avec pour objectif affiché de rétablir ces dispositions inconstitutionnelles. Pour notre part, nous veillerons au respect du principe d’égalité, de la liberté d’entreprendre et de la liberté contractuelle ainsi qu’à prévenir toute atteinte disproportionnée qui pourrait leur être portée »,prévient Bernard Spitz, le président de la Fédération française des sociétés d’assurances. De nouvelles passes d’armes se profilent.