Ce sera le procès d’un sauvetage hors norme. Le 29 septembre prochain, un tribunal fédéral de Washington va juger la plainte de Maurice « Hank » Greenberg, quatre-vingt-neuf ans, ancien patron historique du géant américain de l’assurance AIG, contre le gouvernement américain. Celui qui a tenu les rênes d’AIG pendant quatre décennies, avant d’être évincé en 2005 à la suite d’une enquête sur la comptabilité du groupe, conteste le sauvetage de la compagnie d’assurances en 2008, au plus fort de la crise financière. Son fonds Starr International Company, à travers lequel Maurice Greenberg détenait à l’époque une participation de 12 % dans AIG, était le deuxième actionnaire du groupe d’assurances au moment où le gouvernement américain en a pris le contrôle. Selon le « Wall Street Journal », les avocats de Starr estiment que le gouvernement a cherché à punir de façon illégale les actionnaires d’AIG et a exploité la situation intenable dans laquelle se trouvait l’assureur pour prendre 79,9 % de la compagnie en échange de son aide. Il se serait ainsi, selon Starr, emparé du capital des actionnaires en violation de la Constitution des Etats-Unis. Au total, l’aide financière de l’Etat s’est élevée à 182 milliards de dollars, sous forme de liquidité et de garanties.

Dans une précédente plainte, déposée auprès d’un tribunal fédéral de Manhattan en 2011, Starr affirmait également que la Fed de New York avait profité de sa prise de contrôle d’AIG pour obliger l’assureur à liquider ses « credit default swaps » dans des conditions défavorables à AIG. Et ce pour aider les contreparties (principalement des banques de Wall Street) à renforcer leurs bilans, selon l’agence Dow Jones. Starr, qui réclamait à l’époque 25 milliards de dollars de dommages et intérêts, avait été débouté. 

Cette fois-ci, selon le « Wall Street Journal », Starr réclamerait plus de 40 milliards pour les pertes subies par Greenberg et par d’autres actionnaires lors du sauvetage d’AIG. Ce procès devrait durer six semaines. L’ancien président de la Fed, Ben Bernanke, et l’ancien secrétaire au Trésor, Timothy Geithner, pourraient être appelés à témoigner. Cet épisode va replonger AIG dans les affres de la crise financière, alors que la compagnie, qui a remboursé 205 milliards de dollars au gouvernement, cherche à tourner la page. L’assureur pourrait en outre y laisser des plumes. Selon le « Wall Street Journal », l’accord qui a permis le sauvetage d’AIG prévoit en effet que ce dernier indemnise la Fed de New York pour tout paiement en rapport avec un litige lié à ces prêts fournis en urgence. 

V. Ch., Les Echos