P. S.

MESURER LES COMPORTEMENTS SANTÉ DES ASSURÉS EST DEVENU TRÈS SIMPLE. LE MODÈLE RESTE ENTRAVÉ PAR LA QUESTION DE L’UTILISATION DES DONNÉES.
Bonne nouvelle pour Apple. Le

géant américain de l’assurance-santé Aetna
envisage de proposer à ses dizaines de millions de clients (23 millions pour sa seule offre d’assurance médicale) des Apple Watch à tarif réduit. L’assureur offre déjà des Apple Watch gratuites à ses 50.000 employés pour les encourager à améliorer leur mode de vie en matière de santé. De quoi relancer
les ventes de la montre aux résultats pour l’instant mitigés
. Ce genre d’accord présente un intérêt évident pour les assureurs. Il s’agit de « faire de la prévention et favoriser les bons comportements, ce qui peut représenter une économie majeure pour l’assureur comme pour l’assuré », détaille Dimitri Carbonnelle, fondateur de Livosphere et spécialiste des objets connectés.
L’enjeu des données
Pourtant, dans le cas Apple-Aetna, les discussions officiellement lancées à la mi-août n’ont pas encore abouti. Apple se montre en effet particulièrement sourcilleux sur le partage des informations de santé stockées dans les Apple Watch. L’enjeu est de bien définir ce que l’on veut faire de ces données. Il est commercial et sécuritaire. Des associations de consommateurs, comme l’UFC-Que Choisir en France, se disent inquiètes du fait que ces données puissent tomber entre de mauvaises mains, mais, surtout, qu’elles soient utilisées pour mesurer le niveau de risque des utilisateurs pour les assureurs.

Ces questionnements ne sont pas nouveaux
et chaque assureur y répond à sa façon. Début 2017, Generali France s’était associé au sud-africain Discovery pour
lancer un programme de récompenses
(promotions et cartes cadeaux chez des partenaires) des bons comportements en matière de santé, comme faire du sport ou manger sainement. Ces récompenses n’incluent toutefois pas de réduction sur la prime d’assurance, puisque la loi Evin interdit en France la tarification basée sur des données médicales. En outre, « en France, les assureurs sont très précautionneux sur les données, car la perception du public peut être négative », précise Dimitri Carbonnelle.
Rabais sur les primes
A l’inverse d’autres modèles n’hésitent pas à établir un lien direct entre niveau de prime et amélioration des comportements de santé. C’est le cas, par exemple, de Generali Allemagne. Les clients peuvent être récompensés par des rabais sur leur prime d’assurance allant de 11 % à 16 % ou par des bons de réduction chez des partenaires. Generali insiste toutefois sur le fait qu’un « client qui ne participe pas ne sera pas pénalisé ». Approche comparable aux Etats-Unis avec la compagnie d’assurances John Hancock, pionnière des offres d’assurance-santé liées aux objets connectées. Lui aussi en partenariat avec Discovery, l’assureur a proposé en 2016 le contrat Vitality, lié à un bracelet connecté Fitbit. John Hancock peut ainsi évaluer l’hygiène de vie de ses clients et proposer des réductions de primes de risque pouvant aller jusqu’à 15 % en cas d’excellents résultats (sportifs, alimentaires, etc.). Depuis, les géants Prudential (notamment au Royaume-Uni) et l’américain Humana ont suivi le même chemin.<Discovery, pionnier de l’assurance-santé connectée, s’exporte avec succès
P.S.
LE SUD-AFRICAIN DISCOVERY A PRIS DE L’AVANCE SUR LES OFFRES CONNECTÉES, AVANT DE NOUER DES PARTENARIATS DANS LE MONDE ENTIER.
Les compagnies d’assurances Generali, John Hancock, Prudential et Humana ont un point commun. Toutes ont développé leur offre d’assurance-santé relative aux objets connectés en partenariat avec l’assureur sud-africain Discovery. De Singapour aux Etats-Unis et de la France à la Chine, Discovery s’est imposé comme la référence des offres connectées d’assurance-santé.

L’assureur sud-africain a été le premier à proposer une offre d’assurance-santé comportementale liée aux objets connectés avec sa formule Vitality, en prenant en compte les habitudes sportives,

mesurées par un bracelet Fitbi
t, et les comportements alimentaires des utilisateurs. En échange de ces bons comportements, Discovery a instauré l’idée de la réduction des primes de risque. L’assureur a aussi développé des offres partenaires (places de cinéma, billets d’avion).
Discovery s’est rapidement retrouvé gagnant, car les dépenses maladie des personnes qui participent à son programme Vitality

sont en moyenne 20 % moins élevées que celles des autres assurés.
La formule de la prévention fonctionne et, par conséquent, s’exporte particulièrement bien. Les plus gros assureurs de la planète ont recours à l’expertise de Discovery pour développer des offres semblables. PruHealth, développé avec Prudential au Royaume-Uni, est un succès commercial, comme Vitality avec John Hancock aux Etats-Unis. La limite est encore pour l’instant de fidéliser des clients sur la durée via ces offres, toutes plutôt récentes.
Difficultés françaises
Le marché français reste toutefois plus complexe à conquérir. La situation n’est en effet pas la même en France et aux Etats-Unis. OutreAtlantique, les assurances-santé sont largement plus coûteuses. Les consommateurs américains sont donc plus facilement prêts à transmettre leurs données pour diminuer les prix de leurs primes de risque.

Des offres adaptées, inspirées de Vitality mais faisant plus attention à la protection des donnés, pourraient cependant voir le jour. « On peut imaginer une solution avec un tiers de confiance qui récupérerait les données et où les assureurs ne pourraient pas identifier les utilisateurs », développe Dimitri Carbonnelle, spécialiste des objets connectés et fondateur de Livosphere. Pour l’instant, les assureurs avancent en tout cas avec prudence. Deux ans avant Generali, en 2014, AXA avait fait une tentative en offrant un tracker d’activité aux souscripteurs de son offre d’assurance-santé. Ce bracelet connecté devait mesurer les pas des utilisateurs et les récompenser avec des réductions sur des soins de médecine douce. Plusieurs associations de consommateurs s’étaient alors inquiétées de ce modèle.

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