Après la Matmut, la MAAF. Le groupe niortais a annoncé, jeudi, qu’il n’augmenterait pas non plus ses tarifs d’assurance auto pour ses clients en 2015 (à situation d’assurance identique). « C’est une petite prouesse dans le contexte actuel, car tout pousserait plutôt à devoir procéder à des hausses de tarifs. Je ne pense pas que beaucoup d’opérateurs pourront se positionner dans une telle dynamique », n’hésite pas à affirmer Joaquim Pinheiro, directeur général de la MAAF.

De fait, les premiers mois de l’année n’ont pas été favorables, avec une inflation continue des coûts d’indemnisation doublée d’une hausse de la fréquence des dommages corporels. Et ce alors que les équilibres techniques de la branche s’étaient dégradés l’an dernier avec un ratio combiné (sinistres et frais rapportés aux primes) remonté à 104 %, contre 101 % en 2012. Il n’en reste pas moins que le secteur aura du mal à relever trop sensiblement ses tarifs. Explications.

Des tarifs plus individualisés en auto

En prenant ainsi les devants, la Matmut (qui n’augmentera pas non plus le prix de ses contrats habitation) et la MAAF mettent évidemment un peu la pression sur la concurrence. Pour Cyrille Chartier-Kastler, fondateur du cabinet Facts & Figures, il faut dans ce contexte s’attendre à des politiques beaucoup plus différenciées qu’avant, les assureurs prenant davantage en compte certains critères comme la fidélité ou la détention de plusieurs contrats chez eux, notamment. Il table ainsi sur « une absence de hausse, voire une baisse de tarifs pour les meilleurs risques en portefeuille ». Selon lui, les majorations seront comprises entre 0 et 2 % pour la majorité des clients. « Les compagnies vont en revanche devenir de plus en plus dures vis-à-vis des mauvais risques en les résiliant ou en leur faisant payer le juste prix », anticipe le consultant.

En habitation, des majorations plus élevées…

En multirisque habitation (MRH), les révisions devraient être, comme d’habitude, plus marquées qu’en automobile. « On se situera, comme l’an dernier, dans une tendance globale de hausse des cotisations étant donné la charge liée aux événements naturels », indique ainsi Joaquim Pinheiro.

Avec un ratio combiné à 104 % l’an dernier, le marché de la MRH est en effet structurellement déficitaire. Mais, « c’est le fait de certains contrats chez certains opérateurs. Tout le monde ne perd pas de l’argent sur les contrats MRH », insiste Cyrille Chartier-Kastler, soulignant que les bancassureurs ont réussi à améliorer leurs résultats techniques en 2013. Selon ses pronostics, les bons risques (peu exposés aux aléas climatiques ou aux vols, en particulier) ne devraient pas se faire appliquer des majorations supérieures à 1 ou 2 %. Les hausses de tarifs moyennes devraient tourner autour de 3 à 4 % pour le gros des portefeuilles. Mais pour les risques trop exposés ou sous-tarifés, l’addition pourrait être beaucoup plus lourde : + 5 à 10 %. « Ces dernières années, beaucoup d’assureurs n’ont pas osé retarifer suffisamment certains contrats », constate-t-il.

… Mais sous pression des clients

Quoi qu’il en soit, les assureurs n’ont pas une marge de manoeuvre infinie dans le contexte économique. « Le consommateur ne suit plus des hausses de tarifs trop importantes », affirme Cyrille Chartier-Kastler. Le dirigeant d’une grande compagnie décrit ainsi des clients qui n’hésitent plus à renégocier leurs tarifs. « C’est un phénomène que l’on voit surtout depuis dix-huit mois », explique-t-il. Et qui lui coûte 0,5 point de son chiffre d’affaires en auto comme en MRH. 

Laurent Thévenin, Les Echos