Laurent Thévenin
Aviva détaille le nombre de sinistres qu’il a remboursés pour tenter de faire changer le regard sur l’assurance. Des assurtech veulent aussi se démarquer en donnant davantage à voir.
C’est à un exercice d’un genre inédit que s’est livré Aviva. Le premier assureur britannique vient de publier un rapport dans lequel il détaille la manière dont il a géré les sinistres en 2017 au Royaume-Uni. Une manière, selon lui, de tordre le cou à « l’idée fausse que les assureurs ne remboursent pas ». Cette opinion est en tout cas largement répandue, puisque, selon un sondage diligenté par Aviva, 55 % des personnes interrogées pensent que leur assureur cherchera à éviter de payer s’il le peut. Sa filiale britannique veut apporter la preuve du contraire, chiffres à l’appui. Elle dit avoir accepté 96 % des demandes d’indemnisation présentées par ses clients particuliers ou entreprises en 2017, soit 962.000 dossiers. Dans ce document très circonstancié, celle-ci explique aussi pourquoi 4 % des sinistres ne pouvaient pas faire l’objet d’un paiement, en mettant en avant les cas de figure les plus courants.
Aviva UK invite le reste du secteur à faire preuve de la même transparence. « Si les gens ont le sentiment que l’assurance ne va pas les indemniser, alors ils ne vont pas se préoccuper de l’acheter », justifie Andy Briggs, son directeur général, cité dans un communiqué.

Dans un style différent, d’autres acteurs ont senti qu’ils pouvaient se différencier en jouant la carte de la transparence.
Lemonade, l’une des assurtech les plus en vue du monde, en a même fait une marque de fabrique. Cette compagnie, qui veut s’imposer sur le marché de l’assurance-habitation aux Etats-Unis avec la promesse de délivrer un contrat en 90 secondes et d’indemniser une large part des sinistres quasiment en temps réel grâce à l’intelligence artificielle, publie régulièrement sur son blog des « chroniques de la transparence ».

La livraison du mois de juin – sous le titre accrocheur « Parfois nous craignons : les hauts et les bas de Lemonade au premier semestre 2018 » – se veut un modèle du genre. La jeune pousse y fait un point sur ses performances commerciales (marquées par une croissance exponentielle du nombre d’assurés), ses résultats techniques (dans le rouge et très loin du niveau voulu) ou la satisfaction client (au zénith, selon elle).

Aller au-delà des obligations légales
Sans oublier, évidemment, d’aller dans le sens du consommateur… « Malgré le fait que nous ayons reçu très peu de plaintes, nous aurions pu faire un meilleur travail pour régler les sinistres plus rapidement. Notre délai médian pour gérer les sinistres de manière manuelle était d’environ 11 jours. Cela peut sembler raisonnable, mais nous ne pouvons pas laisser passer ça », écrit ainsi Shai Wininger, son cofondateur.

Cette initiative a visiblement donné des idées à l’assurtech française Alan, spécialisée dans la santé-prévoyance
, qui vient de mettre en ligne sur son blog un premier article dans la même veine. « On aurait pu se contenter de vous donner accès aux documents officiels » – comme le rapport SFCR sur la solvabilité et la solidité financière que les compagnies d’assurances doivent publier chaque année -, mais « on a voulu aller plus loin et partager nos chiffres », écrit son cofondateur Charles Gorintin. « Notre ratio sinistres sur primes était de 64 % en 2017. En clair, pour 100 euros collectés, on rembourse en moyenne 64 euros de frais de santé », y lit-on.

Alan fait apparaître aussi ses frais de gestion des contrats (113 %), ses dépenses annuelles (consacrées à 77 % à la masse salariale et à ses bureaux) ou le nombre de départs d’assurés (« Sur un an, 20 % de nos utilisateurs nous quittent. Pour la plupart, ils changent d’entreprise », est-il indiqué). « La transparence, c’est aussi partager ce qu’on ne fait pas bien : [parmi les utilisateurs ayant fait une demande sur le tchat du site, NDLR], les 10 % les moins chanceux ont dû attendre plus de 1 heure et 8 minutes pour obtenir une réponse », ne manque pas d’ajouter Alan. La jeune pousse promet de donner des nouvelles tous les six mois.

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