La parade des géants se poursuit outre-Atlantique dans le secteur de l’assurance-santé. Trois semaines après le rachat à 37 milliards de dollars de Humana par Aetna – donnant naissance au numéro deux du secteur -, c’est au tour d’Anthem d’affoler les compteurs. Le groupe d’assurance-santé s’adjuge finalement son homologue Cigna, pour 54,2 milliards de dollars (49,5 milliards d’euros). En juin, Anthem avait indiqué avoir fait quatre offres sur Cigna, dont la dernière avait été rejetée le 20 juin. La proposition est ainsi passée de 184 dollars par action à 188 dollars. C’est sans doute l’annonce du mariage Aetna-Humana qui a aussi poussé les deux acteurs à avancer faute de « plan B ».

Sous réserve des autorisations d’usage, cette acquisition donnera naissance au second semestre 2016 au plus gros assureur-santé outre-Atlantique en termes de personnes couvertes, totalisant 53 millions de clients et environ 115 milliards de dollars de chiffre d’affaires. L’actuel champion, United Health, qui couvre 46 millions d’assurés, demeure pour l’heure seul au bord de la piste de dance.

Fièvre d’acquisitions

Tous ces mouvements s’inscrivent dans le cadre d’une vaste consolidation de l’assurance-santé, dans le sillage de l’Obamacare. Cette réforme phare a permis à des millions d’Américains d’acheter une assurance-santé et ils seront sans doute encore plus nombreux à l’avenir, puisque la Cour suprême a validé fin juin l’une des principales dispositions fiscales du système. Mais si celui-ci apporte une part grandissante de leur chiffre d’affaires aux assureurs-santé, Medicare et Medicaid pèsent aussi sur leurs coûts en leur imposant des règles tarifaires plus strictes. D’où la recherche d’économies d’échelle. Grossir met aussi les assureurs en position de force à l’heure de négocier les tarifs, tant avec les hôpitaux qu’avec leurs clients, notamment les employeurs.

 

En quelques mois, cette logique a conduit à une fièvre d’acquisitions : encore à cinq en début d’année, le nombre d’acteurs sera bientôt ramené à trois si ces opérations vont à leur terme. Le coup de frein pourrait paradoxalement venir des autorités de la concurrence, qui ne voient pas sans méfiance grandir ces mastodontes de la santé. Sans forcément casser ces unions naissantes, les gendarmes pourraient exiger des contreparties – comme par exemple des cessions d’actifs -, afin d’éviter que ces géants ne deviennent tout bonnement des ogres, soulignent plusieurs analystes. Seul problème, souligne Reuters, le secteur devient si concentré que de telles cessions seraient sans doute complexes à mettre en oeuvre. 

Edouard Lederer, Les Echos