Avant l’affaire BNP Paribas, un précédent opposant la justice américaine à une banque française a laissé une trace profonde. Hors normes par sa complexité, sa durée, les parties impliquées et ses conséquences pour le contribuable français, l’affaire Executive Life a défrayé la chronique pendant une douzaine d’années.

Tout part du rachat,en 1991, par le Crédit Lyonnais d’Executive Life, un assureur-vie californien. Alertées par une dénonciation anonyme en 1998, les autorités américaines estimeront qu’il s’est fait en violation des lois locales. Le Crédit Lyonnais, entreprise publique à l’époque des faits, sera accusé d’avoir organisé, via sa filiale Altus Finance, cette acquisition par un groupe d’investisseurs menés par l’assureur MAAF. Un montage qui lui a permis de contourner la législation américaine qui lui interdisait une telle acquisition. Artémis, le holding de l’homme d’affaires français, François Pinault, sera lui aussi rattrapé par les poursuites, en tant qu’acquéreur auprès d’Altus d’un ancien portefeuille de « junk bonds » d’Executive Life, puis de la compagnie d’assurances elle-même en 1995.

A la différence du dossier BNP Paribas, qui n’implique que la banque, Executive Life concernait directement l’Etat. Le dossier empoisonnera d’ailleurs la vie de plusieurs gouvernements, de gauche comme de droite, donnant lieu à un bras de fer entre la France et les autorités américaines car il s’agissait de défendre les intérêts du contribuable. Les tentatives de médiation civile échouent. « La pression politique n’a servi à rien », souligne un protagoniste de l’affaire. En 2005, à l’ouverture du procès civil, le Crédit Lyonnais (privatisé depuis 1999) et le CDR, la structure de défaisance publique chargée de gérer ses actifs douteux, acceptent finalement un accord à l’amiable pour 600 millions de dollars. En 2006, Jean Peyrelevade, l’ex-président du Lyonnais, plaide de son côté coupable pour éteindre les poursuites engagées contre lui. Il est condamné à 500.000 dollars d’amende et à 5 ans de mise à l’épreuve. Les ennuis judiciaires d’Artémis ne prendront fin, eux, qu’en novembre 2012 suite à une décision favorable d’un jury populaire californien.