Alors que les tests sur les voitures autonomes se multiplient aux Etats-Unis et ailleurs, les assureurs ne semblent pas encore s’en préoccuper outre-mesure. D’après une étude réalisée par le cabinet de consultants KPMG auprès de dirigeants de compagnies d’assurance américaines, les trois quarts d’entre eux déclarent ne pas être préparés à l’arrivée de tels véhicules. Et la plupart n’envisagent toujours pas de se pencher sur la question dans les 12 à 18 mois. Ils sont même 23 % à reconnaître ne pas savoir grand-chose, voire rien du tout, sur le sujet. A l’opposé, seules 10 % des compagnies interrogées affirment avoir déjà développé un plan stratégique intégrant cette nouvelle donne.

Pour les assureurs, cela apparaît un sujet d’autant plus lointain qu’ils sont plus de 8 sur 10 à estimer que la voiture sans conducteur n’aura pas d’impact significatif sur leur activité avant 2025. « Mais le changement va arriver beaucoup plus vite que ce que la plupart imaginent », prévient KMPG. Et il sera « profond ». Car si les véhicules autonomes se généralisent sur les routes, c’est bien tout l’écosystème de l’assurance auto qui risque d’être ébranlé.

Au rayon des points positifs, leur apparition devrait normalement entraîner une diminution du nombre d’accidents de la route – qui sont d’origine humaine dans 90 % des cas. Et même si le coût des réparations pourrait augmenter du fait de la technologie embarquée à bord de ces voitures, le coût total des sinistres pourrait baisser de 40 % entre 2013 et 2040 aux Etats-Unis, selon les projections de KMPG ! En toute logique, cette chute devrait se traduire par une baisse des primes d’assurances. A ce stade, la majorité des assureurs interrogés dans cette étude tablent cependant sur un maintien de leur rentabilité opérationnelle.

Autre conséquence prévisible, la structure même du marché devrait considérablement évoluer. Dans un contexte où va aussi se développer la voiture « partagée » ou la voiture « à la demande », la taille du marché de l’assurance auto de particuliers pourrait se réduire à moins de 40 % de sa taille actuelle dans les vingt-cinq prochaines années, d’après KMPG.

A contrario, les lignes commerciales (assurance des flottes de véhicules) devraient représenter une part plus importante du marché. D’autant plus que c’est la responsabilité civile des constructeurs automobiles – mais aussi des fabricants de logiciels – qui devrait être souvent mis en cause en cas d’accident. Pour 94 % des assureurs, il faudra faire évoluer la couverture de la responsabilité civile avec la voiture sans conducteur. Ils pensent aussi que cela va leur offrir de nouvelles opportunités en termes d’offres de produits.

Selon eux, le marché de l’assurance de la voiture autonome devrait aussi attirer de nouveaux compétiteurs. Interrogés sur le rôle que pourrait tenir Google, ils le voient intervenir d’abord comme un fournisseur de données (87 %) mais aussi un distributeur de produits d’assurance (55 %), donc susceptible de les désintermédier. 

Laurent Thévenin, Les Echos