Avec la généralisation prochaine de la complémentaire santé d’entreprise, le marché de l’assurance-santé va très vite changer complètement de physionomie. Alors que 60 % de la population est couverte par une garantie souscrite à titre individuel, ce ne sera plus le cas que pour 43 % des Français en 2016, estime la société en actuariat-conseil Actuaris dans une étude présentée aujourd’hui. La majorité d’entre eux seront alors assurés par un contrat collectif.

Et contrairement à ce que pourrait laisser croire la polémique sur les clauses de désignation, le marché de l’assurance collective ne basculera pas du jour au lendemain vers les accords de branche. D’après les projections faites par Actuaris, en 2016, les quelque 19 millions de salariés seront couverts pour 79 % via des accords d’entreprise et pour 19 % via des accords de branche. La part des accords de branche grimpera à 25 % en 2018 – soit 5 millions de salariés tout de même – contre 9 % en 2013. «  Il y aura beaucoup de signatures d’accords d’entreprise avant la date-butoir de 2016, car ils sont plus simples et rapides à mettre en place qu’un accord de branche », explique Céline Blattner, associée responsable du pôle prévoyance santé d’Actuaris.

Pour l’heure, 64 conventions collectives ont déjà un régime santé de branche. Alors que cela concerne au total potentiellement 3,5 millions de salariés, seuls 1,6 million sont en fait couverts par ces accords, nuance Actuaris, qui a recensé les entreprises ayant réellement adhéré à ces régimes. Ce décalage tient au fait que « la montée en charge des accords de branche prend plusieurs années,souligne Céline Blattner. Sauf clauses de migration très rares, les entreprises déjà couvertes par un accord d’entreprise et proposant des garanties supérieures à celles du régime santé de branche ne sont pas tenues d’y adhérer », précise-t-elle. Sur les accords de branche avec désignation, la part d’entreprises rejoignant ce régime atteint de 75 % à 90 % au bout de cinq ans, a constaté Actuaris. En revanche, elle arrive péniblement à 15 % en cas de simple recommandation de l’assureur.

Dans ces conditions, « les assureurs positionnés en santé collective (compagnies, mutuelles, institutions de prévoyance) doivent se dépêcher d’aller chercher toutes les entreprises qui n’ont pas encore de contrat collectif avant que celles-ci ne soient concernées par un accord de branche », conseille Céline Blattner. Le potentiel est énorme puisque 806.000 entreprises et 7,6 millions de salariés ne sont aujourd’hui pas couverts par un régime complémentaire d’entreprise. Comme le montre cette étude, le gros se situe dans les entreprises de moins de dix salariés des secteurs des services et du commerce.

Laurent Thévenin