Les assureurs-crédit ont les yeux rivés sur l’Europe du Sud depuis des mois. La situation économique dégradée et incertaine dans la région, conjuguée à une montée des défaillances et des retards de paiement, les poussent à la plus grande prudence.

A l’arrêt pour les exportations vers la Grèce, l’assurance-crédit n’est plus distribuée qu’au compte-gouttes pour les entreprises helléniques. « Nous ne sommes pas en refus de couverture sur la Grèce, mais nous avons dû réduire nos engagements d’environ 70 % », précise Christophe Cataldo, directeur des risques Europe du Sud chez Atradius. Le deuxième assureur-crédit mondial a cessé de couvrir les entreprises publiques, mais protège encore « les filiales de multinationale, notamment dans la grande distribution, et les entreprises qui sont peu exposées au marché domestique ». Coface avait, pour sa part, commencé à réduire son exposition à la Grèce et stoppé la souscription de nouveaux contrats dès l’automne dernier. Déjà faibles avant, ses encours sont aujourd’hui concentrés essentiellement sur le secteur de la distribution. Comme ses concurrents, le groupe français est suspendu à une éventuelle sortie du pays de la zone euro. «  Si cela devait se produire, cela mettrait en difficulté les entreprises importatrices qui auront une dette en euros mais des revenus dans la nouvelle devise grecque », explique Yves Zlotowski, économiste en chef.

Espagne : garanties réduites

La crise bancaire, sur fond de spéculation immobilière, y fait rage. « Mais telle qu’elle opère aujourd’hui, la crise n’amende pas de manière significative notre opinion sur les entreprises espagnoles et nous continuons à accompagner les sociétés exportatrices », indique Christophe Cataldo. Atradius, dont c’est le premier marché, est néanmoins « plus vigilant en termes de garanties ». Chez Coface, le taux d’acceptation tourne, selon les secteurs, autour de 60 % à 65 %, contre 70 % il y a encore peu. L’assureur-crédit surveille particulièrement le textile, la chimie, l’habillement ou le transport. « La situation en Espagne est paradoxalement une opportunité commerciale, beaucoup de sociétés souhaitant s’assurer contre le non-paiement. Nous y avons donc une activité significative et positive »,relève Joël Paillot, le directeur de l’arbitrage de Coface.

Italie : impayés plus élevés

Le marché y a toujours été difficile pour les assureurs-crédit, qui déplorent une « tradition d’impayés ».« C’est encore pire en période de crise, ce qui explique un taux d’acceptation moins important qu’en Espagne », d’environ 55 %, souligne Joël Paillot. Coface a passé au crible son portefeuille dans la métallurgie, l’agroalimentaire, le textile, la distribution non spécialisée et la construction. Chez Atradius, le taux d’acceptation est tombé ces six derniers mois de 70 % à 60 % en moyenne. Mais, avec de grandes variations d’un secteur à l’autre, souligne Christophe Cataldo : « Les entreprises tournées vers l’export et celles qui n’ont pas besoin de faire appel au crédit bancaire bénéficient d’un réel avantage en ce moment. » Atradius souhaite se développer en Italie et Coface y affiche un solde positif.

LAURENT THÉVENIN