Il est l’un des nouveaux hommes forts de l’assurance mondiale. Comme prévu de longue date, Oliver Bäte succédera à Michael Diekmann à la tête d’Allianz jeudi 7 mai, au lendemain de l’assemblée générale du groupe bavarois. A cinquante ans, il ne sera que le dixième président du directoire en cent vingt-cinq ans d’histoire pour la compagnie d’assurances allemande, un signe de stabilité pour ce poids lourd du DAX qui n’a pas d’actionnaire de référence.

Vu comme un successeur potentiel de Michael Diekmann – de dix ans son aîné – depuis son arrivée chez Allianz en 2008, Oliver Bäte aura connu une ascension express au sein du premier assureur européen. Tour à tour patron des opérations, directeur financier – pendant la crise des dettes souveraines – puis responsable des activités d’assurance pour la France, le Benelux, l’Italie, la Grèce et la Turquie, ainsi que de la ligne de métier assurance de biens et de responsabilité, il s’est forgé une vision complète de la maison munichoise. En cultivant au passage quelques symboles : il fournit lui-même le café expresso italien pour le bar du siège, allée de la Reine, à Munich, et est fier de conduire sa petite berline électrique i3 de BMW, dont il a été un des premiers acheteurs.

Cet infatigable voyageur aura bien besoin d’énergie, alors que le secteur doit relever de nombreux défis : impact des nouvelles technologies sur la distribution et les attentes des clients, taux d’intérêt historiquement bas. Il incarne une forme de changement dans la continuité. « C’est un homme de son temps, en phase avec ce qu’est devenue l’assurance, à savoir une industrie globale et digitale », estime Jacques Richier. Le PDG d’Allianz France décrit un dirigeant « très créatif, qui va beaucoup insister sur l’agilité des équipes et la vitesse de transformation ».

Une remarque qui rappelle qu’Oliver Bäte est aussi un ancien de chez McKinsey, sa seule autre entreprise en vingt-deux ans de carrière, qu’il avait intégrée en 1993 après ses études de commerce à Cologne et à New York. Cette expérience lui « a donné le réflexe du stratège ainsi que l’habitude du questionnement », constate Jacques Richier. Reste à voir si Oliver Bäte – qui est d’un abord direct – imposera un rythme aussi soutenu que Mario Greco, lui aussi un ex-McKinsey, depuis deux ans et demi chez son concurrent italien Generali. Au Forum de Davos, en janvier, un de ses anciens compagnons de route au sein du cabinet de conseil, lui aussi devenu patron dans l’assurance, lui avait distillé quelques conseils : « Impose le tempo, soit plus dur et plus radical », selon des propos rapportés dans la « Frankfurter Allgemeine ».

Les investisseurs sont évidemment dans l’attente des premiers pas d’Oliver Bäte, père de deux enfants, qui prend les rênes d’une institution en bonne santé (lire ci-dessous), présente dans 70 pays et employant 150.000 personnes. « Comme il a été directeur financier, on peut imaginer qu’il sera à l’écoute des marchés, dont il connaît les attentes. Il va sans doute vouloir établir un plan stratégique avec une vision plus à moyen terme, alors qu’Allianz se contente traditionnellement de donner des perspectives de résultats annuelles », espère Benoît Valleaux, analyste chez Natixis.

Et si peu d’Allemands le connaissent, étant donné qu’il n’a jamais dirigé les activités domestiques d’Allianz, Oliver Bäte est en revanche très bien connecté à l’international. Il a pris l’été dernier la présidence de la branche assurance du Forum économique mondial. 

Jean-Philippe Lacour, Les Echos