Par Sophie Rolland

Les nouvelles exigences qui s’imposent aux banques en termes de liquidité et de capital les rendant plus réticentes à accorder des prêts aux PME et aux entreprises de taille intermédiaire (ETI), ces dernières sont à la recherche de nouvelles solutions pour se financer. Selon les estimations de la Société Générale, sur 100 milliards d’euros de crédits aux PME-ETI, de 20 à 30 milliards pourraient faire l’objet d’un financement désintermédié. « Pour l’heure, la désintermédiation concerne essentiellement les ETI », constate Philippe Ferreira, stratégiste à la Société Générale. Il s’agit néanmoins d’une tendance de fond. « Les investisseurs institutionnels devraient de plus en plus chercher à bénéficier des rendements élevés offerts par ces prêts dans un contexte où les PME-ETI veulent emprunter à long terme pour profiter des taux bas et où les banques sont moins présentes sur ces maturités. » Plusieurs alternatives au crédit bancaire s’offrent aux entreprises.

 

 

Le placement privé obligataire

Il s’agit d’un emprunt obligataire placé auprès d’un cercle restreint d’investisseurs. La taille des opérations va de quelques dizaines à quelques centaines de millions d’euros. En volume, les placements privés obligataires représentent actuellement l’essentiel du financement désintermédié des ETI, mais, de fait, les plus modestes n’y ont quasiment pas accès. Le coût de mise en place d’une telle opération est en effet disproportionné lorsque les besoins de financement ne dépassent pas quelques millions d’euros. « Pour un placement privé en euro, les frais de documentation juridique peuvent atteindre plus de 100.000 euros, sans compter les commissions bancaires », indique Charles-Antoine de Fontenay chez HSBC France. Ces derniers mois, Groupe Gorgé, Tessi, Touax ou encore Laurent-Perrier ont diversifié leurs sources de financement grâce à des opérations de ce type. Pour les entreprises, c’est souvent le moyen de diversifier leurs sources de financement, d’en allonger la durée et de se faire connaître auprès des investisseurs.

Le placement privé de prêt

Contrairement au placement privé obligataire, qui nécessite la rédaction d’un prospectus, le prêt désintermédié repose sur un contrat analogue à celui d’un crédit bancaire classique. Il peut donc être mis en place rapidement et à moindres frais. Ces prêts désintermédiés entre des entreprises de taille intermédiaire et des investisseurs se développent depuis 2012, soit sur la base de partenariats entre banques et assurances (Cacib/Axa, Société Générale/Axa, BNP Paribas/Cardif), soit grâce à la création d’un nombre croissant de fonds de prêt (Amundi en janvier, Lyxor plus récemment). « Le placement se limitant le plus souvent à un maximum de trois investisseurs, il permet une totale confidentialité de l’opération », explique Philippe Ferreira. La taille des opérations va de quelques dizaines à quelques centaines de millions.

Le fonds commun de placement

A l’instar des initiatives Micado France (« Les Echos » du 24 septembre 2012) et Giac (« Les Echos » du 26 septembre), les FCP sont des véhicules d’investissement dans lesquels sont logées des lignes de crédit de taille et d’émetteurs divers. Ils permettent à des acteurs qui, a priori, n’ont pas la taille critique d’accéder au marché du crédit. L’accueil mitigé des investisseurs – lié à leur difficulté à évaluer le risque – explique que les montants levés par ces FCP aient été inférieurs aux attentes, mais « le chemin est tracé et ce type d’emprunt mutualisé pourrait à l’avenir attirer plus d’investisseurs », estime un banquier.

L’IBO (« initial bond offering »)

Dernière innovation en date, l’IBO (« Les Echos » du 12 novembre 2012) a permis à une poignée d’entreprises de taille moyenne (Capelli, AgroGeneration, Homair Vacances, Soufflet) de lever de la dette. Lancée par Nyse Euronext à la fin de l’année 2012, l’IBO permet de reproduire sur le marché de la dette ce qui existe sur le marché actions, avec la procédure d’IPO (introduction en Bourse). Pour accéder, via une IBO, aux investisseurs, l’entreprise emprunteuse doit solliciter une note de crédit auprès d’une agence reconnue par l’Autorité européenne des marchés et émettre au minimum 5 millions d’euros de dette.

Sophie Rolland, Les Echos