Haro sur les clauses de désignation ! Alors qu’elles viennent d’être confortées par la loi généralisant la complémentaire santé d’entreprise, ses opposants ne désarment pas. Allianz France, l’un des poids lourds de l’assurance-santé, a annoncé vendredi avoir déposé le 22 mai une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) auprès du Conseil d’Etat et de la cour d’appel de Paris pour en « contester la validité », ainsi que celle des clauses de migration qui les accompagnent parfois. La désignation donne la possibilité aux partenaires sociaux de sélectionner un assureur unique pour assumer la gestion du régime de frais de santé pour l’ensemble des salariés d’une branche professionnelle. Les clauses de migration obligent les entreprises ayant déjà une couverture collective à adhérer au contrat retenu par la branche. Mi-mai, des parlementaires UMP avaient déjà saisi le Conseil constitutionnel sur le sujet.

L’action d’Allianz France intervient alors que l’assureur conteste devant la justice la désignation de l’institution de prévoyance du groupe Mornay (devenu depuis Klesia) pour le régime frais de santé de la branche de la pharmacie d’officine.« Nous n’avons pas été retenus alors que nous étions ressortis premiers à l’issue de l’appel d’offres », explique Sylvain Coriat, directeur des assurances des personnes chez Allianz France. L’affaire est toujours devant la cour d’appel de Paris et devrait être jugée avant la fin de l’année, précise-t-il.

« Un monopole de fait »

Allianz France avance plusieurs arguments pour justifier cette QPC qui porte sur l’article L.912-1 du Code de la Sécurité sociale. Selon lui, cet article « méconnaît la liberté contractuelle de choisir son assureur et de celle de déterminer le contenu du contrat dans lequel on s’engage ». L’assureur argue aussi que« l’entreprise, par rapport à la branche, constitue le niveau de référence de la négociation collective ». Enfin, cet article irait à l’encontre de « la liberté d’entreprendre en instituant des monopoles de fait sans garantir que l’organisme désigné est bien le mieux-disant ni en termes de garanties ni en termes de tarifs ».

Sans détour, l’assureur décrit là « un monopole de fait au bénéfice des institutions de prévoyance », auxquelles sont revenues en quasi-totalité les désignations déjà mises en jeu. « Cela se fait au détriment des autres assureurs, de leurs salariés, des intermédiaires d’assurance et des entreprises qui sont forcées de rejoindre un organisme assureur qu’elles n’ont pas choisi », affirme Sylvain Coriat, qui rappelle que l’Autorité de la concurrence a aussi émis des réserves sur la manière dont fonctionnent les clauses de désignation.

Laurent Thévenin