Le gouvernement ressort son plumeau pour dépoussiérer le Code civil. Après le droit des contrats, récemment réformé par voie d’ordonnance, le principe général de responsabilité pour faute va y être toiletté à son tour. Jean-Jacques Urvoas, le garde des Sceaux, présente ce vendredi le texte de l’avant-projet de réforme visant à faciliter la lecture et l’application de cet élément fondamental du droit français. « Il est temps que le droit de la responsabilité civile, qui s’est développé hors du Code civil, rentre dans son foyer naturel », estime le ministre.
De fait, les articles qui encadrent la responsabilité civile subsistent toujours dans leur forme originelle, celle de 1804. A l’époque, les rédacteurs du Code civil n’avaient pas prévu qu’un tel principe puisse s’appliquer un jour à d’autres personnes physiques ou morales que les pères de famille pour réparer les dommages commis par leurs enfants mineurs. Sauf que très vite, et révolution industrielle oblige, cette responsabilité civile s’est imposée aux entreprises, tout aussi concernées en raison du pouvoir de subordination qui s’y exerce sur les employés. Et les cas de figure dans lesquels ce droit s’applique se sont multipliés : responsabilité « du fait des choses », du fabricant, « du fait d’autrui », pour troubles anormaux du voisinage… De quoi faire prospérer une jurisprudence aussi luxuriante qu’impénétrable, sinon par des juristes aguerris et rompus à l’analyse des textes. « L’objectif de la réforme est d’introduire toutes ces règles dans le Code civil, de les rendre accessibles et lisibles », explique un conseiller du ministre de la Justice.
La fin de débats byzantins
La réécriture annoncée du Code est aussi l’occasion de sortir de certains débats byzantins. La réparation d’un préjudice corporel, tiraillée depuis plus de trente ans entre « responsabilité contractuelle » et « responsabilité extra-contractuelle », ne relèvera plus que de cette dernière, et ce dans tous les cas de figure. L’avant -projet de réforme de la responsabilité civile stipule la création d’une base de données jurisprudentielles contrôlée par l’Etat et contenant tout un référentiel d’indemnisation. Cet outil, à caractère indicatif, doit permettre à la victime d’apprécier le montant de la réparation à laquelle elle peut prétendre. Avec cette base, les assurances devraient, pour leur part, savoir à quoi s’en tenir. Cette oeuvre de clarification s’annonce tout aussi déterminante sur l’évolution des relations entre l’Assurance-maladie et les assureurs. Le recours à ces tiers payeurs fait l’objet d’une profonde divergence de jurisprudence entre le Conseil d’Etat et la Cour de cassation, préjudiciable aux victimes à indemniser. La réforme propose un mode opératoire plus fluide et plus juste.
L’avant-projet de cette réforme est mis en ligne ce vendredi matin, dans le cadre de la concertation voulue par le ministère de la Justice. D’une durée de trois mois, elle lui permettra de recueillir avis et suggestions pour faire évoluer un texte qui devrait être bouclé à la fin de cette année.
Joël Cossardeaux, Les Echos
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