C’est l’une des pépites françaises de la tech qui s’apprête à battre pavillon étranger. Le fonds américain Silver Lake, associé au britannique AltaOne, propose de racheter l’éditeur de logiciels Cegid, fondé par Jean-Michel Aulas. Le prix offert est de 62,25 euros par action (+ 1,25 euro au cas où 95 % des titres sont apportés) et de 44,25 euros par bon d’acquisition remboursable. Soit une prime de 20 % par rapport au cours du 15 avril et de 44 % sur la moyenne des douze derniers mois. L’offre, amicale, valorise la société environ 580 millions d’euros.
Un accord a déjà été trouvé pour l’acquisition des participations des deux principaux actionnaires : Groupama (26,9 % du capital) et Icmi, le holding contrôlé par Jean-Michel Aulas (10,7 %). D’autres actionnaires, représentant 5,9 % du capital, se sont aussi engagés à apporter leurs titres à l’offre. L’OPA sur le solde des actions devrait être lancée au second semestre.
C’est une page qui se tourne pour le groupe lyonnais. Créé en 1983, introduit en Bourse en 1986, Cegid, spécialisé dans les progiciels de gestion, fait partie du Top 5 des éditeurs français. Son chiffre d’affaires s’élevait en 2015 à 282,1 millions d’euros (en hausse de 5,8 %), pour un résultat net de 23,2 millions (+4,8 %). L’éditeur a réussi sa transition vers le « cloud computing » : l’activité représente près d’un quart de ses revenus et soutient la croissance.
Une décision pas facile à prendre
« Cette annonce est l’aboutissement de plusieurs décennies d’efforts et ouvre un nouveau chapitre pour Cegid », commente Jean-Michel Aulas, qui concède néanmoins aux « Echos » que la décision de vendre « n’a pas été facile à prendre ». L’entrepreneur, également président actionnaire de l’Olympique Lyonnais, avait tenté de racheter la participation de Groupama (entré en 2007) l’an dernier, en vain. C’est finalement l’assureur qui a réussi à attirer de nouveaux fonds pour revendre sa part. Silver Lake, spécialisé dans la tech, a été séduit et l’accord avec les deux principaux actionnaires a été finalisé en moins de deux mois.
C’est un coup dur pour l’industrie française du logiciel, qui voit partir l’un de ses fleurons. « On rêverait que les gros investisseurs ou consolidateurs soient plus souvent français, reconnaît Loïc Rivière, délégué général de Tech’In France. Mais on sait qu’il n’y en a pas en France pour des entreprises comme Cegid, qui ont besoin, tôt ou tard, d’envisager leur destin avec des acteurs susceptibles de les aider à grandir, en particulier à l’étranger. » Si l’actionnariat change de nationalité, la direction, elle, ne bougera pas. Jean-Michel Aulas, âgé de soixante-sept ans, demeure président du conseil et Patrick Bertrand, directeur général de la société, dont le siège reste à Lyon. « Cegid reste un groupe au savoir-faire français qui disposera de nouveaux moyens pour partir à la conquête de l’international. Seuls, nous serions restés sur la défensive », justifie son président, qui réinvestira une partie du produit de cession dans la société.
Un plan de trois ans a déjà été pensé avec Silver Lake pour accélérer l’internationalisation de l’éditeur, qui réalise 10 % de son activité à l’étranger. Les fonds sont aussi prêts à mobiliser leurs importantes ressources financières pour faire de nouvelles acquisitions. Objectif : assurer à Cegid « une place de leader européen de l’édition de logiciels et de services cloud ».
Romain Gueugneau, Les Echos

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