Les assureurs devraient bientôt faire leur apparition sur le marché du prêt aux entreprises. AXA France sera l’un des premiers à s’y aventurer. « Mais nous n’avons pas vocation à nous transformer en banque ni à nous substituer aux banques », prévient Odette Cesari, la directrice des investissements. L’assureur travaillera ainsi en partenariat avec des banques en tant que cofinanceur, car « le Code des assurances nous autorise à détenir des prêts ». AXA France est aujourd’hui en phase de test opérationnel avec deux banques françaises, avant de passer la vitesse supérieure au deuxième semestre. Il a par ailleurs déjà noué des contacts avec une banque allemande et une banque du Benelux.

Dans un premier temps, l’assureur se tournera vers les grosses entreprises françaises non cotées. « Si on veut élargir cette démarche aux PME, et c’est notre objectif, nous devrons mettre en place d’autres moyens. Nous sommes par exemple actuellement en discussion avec Oséo, afin de monter un partenariat pour financer les PME en termes de dette »,annonce Odette Cesari.

Cet intérêt d’acteurs non bancaires pour le crédit aux entreprises se comprend aisément dans le contexte actuel. Comme l’explique AXA France, « le marché du financement aux entreprises est en train de changer structurellement ». Les futures contraintes réglementaires conduisent en effet plutôt les banques à alléger leur bilan. Avec les normes prudentielles de Solvabilité II, les assureurs sont, eux, poussés à investir de plus en plus sous forme d’obligations. «  Mais il est assez difficile de trouver en zone euro des signatures suffisamment diversifiées sur le marché obligataire privé pour se constituer un portefeuille de bonne qualité », expose Odette Cesari. Sur le volet du prêt aux entreprises, les intérêts des banques et des assureurs sont donc convergents.

« Aligner les intérêts »

Concrètement, la banque, qui conservera la relation commerciale avec l’emprunteur, cédera à AXA France la partie du prêt qu’elle ne souhaite pas conserver. « Nous cherchons à aligner les intérêts : comme nous avons de la liquidité à investir, nous avons donc tout intérêt à prendre la part la plus importante du prêt, tandis que les banques ont au contraire intérêt à avoir la part la plus faible »,explique Odette Cesari. Un tel montage devrait permettre aux entreprises d’emprunter davantage que s’il n’y avait que les seules banques.

AXA France ne précise pas le montant des crédits qu’il est prêt à prendre. Une chose est sûre, «  il n’est pas question de prêter à des conditions plus favorables que sur le marché obligataire », insiste-t-il. L’assureur sera évidemment très regardant sur les fonds propres à mettre en face des crédits accordés.« Sous Solvabilité II, plus un prêt (ou une obligation) est long et plus la signature est basse, plus cela coûtera cher en capital. Nous prêterons à cinq ans en moyenne, à sept ans pour les très bonnes signatures, mais sans doute pas au-delà », annonce Odette Cesari.

LAURENT THÉVENIN