Solvabilité II, le nouveau corpus de règles prudentielles de l’assurance, entrera bien en vigueur le 1 er janvier 2013. Mais, devant les inquiétudes des assureurs européens face à ce bouleversement, la Commission européenne se veut rassurante. Profitant d’une conférence organisée sur le sujet hier par l’Autorité de contrôle prudentiel (ACP), Benoît Hugonin, expert national détaché auprès de la Commission européenne, a rappelé que des« mesures transitoires ciblées » étaient à l’étude, sans qu’il soit en aucun cas question d’un « report global » du système. Le sujet sera abordé avec les Etats membres de l’Union européenne la semaine prochaine et au mois de juin.

Sur proposition du Trésor français, il est ainsi envisagé « une phase de rodage » la première année. Ce qui, complète Gabriel Bernardino, le président de l’Eiopa, l’autorité de supervision européenne des assurances et des fonds de pension, se traduirait par un fonctionnement « parallèle » de Solvabilité I et de Solvabilité II« l’espace d’un an ».

Dans un premier temps, les assureurs seraient bien tenus en 2013 d’établir leur bilan prudentiel et de calculer leur exigence de capital cible (SCR), mais « sans que s’imposent toutes les sanctions prévues dans le système », précise Benoît Hugonin. Parmi les sujets qui feront encore l’objet de discussions figurent notamment le traitement des titres hybrides de dette, le choix du taux d’actualisation des provisions techniques et le classement, au sein des fonds propres, des profits futurs inclus dans les primes futures.

« Il n’apparaît pas souhaitable que la totalité du package quantitatif de Solvabilité II soit remis sur la table et discuté à nouveau dans les délais très courts qui nous séparent de la mise en place du nouveau régime. Il faut se concentrer sur les enjeux les plus importants », insiste Christian Noyer, le gouverneur de la Banque de France et président de l’ACP. Alors que le temps presse, l’ACP indique avoir « déjà repris les négociations sur les éléments du QIS 5 [la cinquième étude quantitative d’impact] ayant démontré soit une trop grande complexité de l’exercice, soit une calibration inadaptée ». L’Eiopa, les assureurs et la Commission se retrouvent ainsi dans plusieurs groupes de travail. L’un se penche sur le calibrage du risque de souscription non-vie et santé. Un autre sur le risque catastrophe, jugé mal apprécié par beaucoup d’acteurs. Un troisième groupe de travail planchera sur les profits attendus dans les primes futures et sur les « frontières des contrats ».

Risque de volatilité

Pour Hervé de Villeroché, chef du service du financement de l’économie à la Direction générale du Trésor, des « ajustements » sont encore nécessaires. « Le QIS 5 a montré que ce régime comportait un risque de volatilité assez fort », souligne-t-il. Selon lui, il serait ainsi souhaitable d’envisager des mesures transitoires sur les actions « pour éviter des effets procycliques trop brutaux ». Une manière de préserver au mieux le rôle d’investisseur institutionnel des assureurs, qui sont au coeur du financement de l’économie française.

Autre demande française, régler les problèmes de concurrence auxquels feront face les assureurs européens. Le Trésor a ainsi en ligne de mire les fonds de pension, qui échapperont à Solvabilité II. Il appelle également à une convergence des différents systèmes prudentiels dans le monde, qui sont très différents d’une région à l’autre, les Etats-Unis et l’Asie n’ayant pas de régime aussi ambitieux que Solvabilité II.

G. V. ET L. T., Les Echos