Les assureurs-vie prônent la création d’un nouveau contrat
SOLENN POULLENNECLAURENT THÉVENIN

POUR INCITER LES FRANÇAIS À PLACER LEUR ARGENT À LONG TERME, LES ASSUREURS PROPOSENT DE CRÉER UN CONTRAT EURO BONIFIÉ. IL OFFRIRAIT UN SURCROÎT DE RÉMUNÉRATION AU-DELÀ D’UNE CERTAINE DURÉE DE DÉTENTION.
Les assureurs ont levé un petit coin du voile sur ce que pourrait être le nouveau visage du placement financier préféré des Français. A l’avenir, la rémunération de certains contrats d’assurance-vie pourrait dépendre de la durée d’investissement des épargnants, a fait valoir la Fédération française de l’assurance (FFA) dans sa réponse à la consultation organisée par Bercy en vue du prochain projet de loi sur les entreprises (Pacte).

Afin d’orienter l’épargne des Français vers « les placements longs et productifs », Bercy a soumis à discussion l’idée de

moduler en fonction de la durée de détention « la garantie
des nouveaux contrats d’assurance-vie
en fonds euros ». Le mécanisme évoqué par les pouvoirs publics dans la consultation reposerait notamment sur une garantie « bonifiée » en cas de détention longue, « autour d’une durée pivot de 8 à 10 ans ».
L’objectif du gouvernement est partagé par les assureurs. D’autant plus qu’à leurs yeux, le prélèvement forfaitaire unique adopté dans le budget 2018

a brouillé le système d’incitation fiscale à la détention longue
. Or, les Français privilégient toujours les placements courts et peu risqués, comme le confirment les chiffres publiés mardi par la Banque de France sur les placements financiers des ménages. Au quatrième trimestre 2017, 10,6 milliards de flux financiers sont encore ainsi allés sur les dépôts à vue.
Dans ce contexte, les débats se concentrent aujourd’hui sur l’outil qui encouragerait les épargnants à prendre plus de risques dans des placements plus longs, notamment au sein de l’assurance-vie. Pour la FFA, il ne s’agit pas de modifier la garantie en capital à tout moment, qui fait le succès des contrats en euros. D’autant plus qu’il existe déjà des

contrats euro-croissance
, n’offrant la garantie en capital qu’à partir de huit ans minimum.
Compléter la palette de l’assurance-vie
L’idée de la FFA est plutôt de compléter la palette des contrats d’assurance-vie. A côté des fonds euros « classiques », de l’euro-croissance et des contrats en unités de compte (UC), elle propose de créer un fonds euros bonifié. Ce nouveau produit offrirait « un surcroît de rémunération ne récompensant que la détention longue, au-delà d’un certain nombre d’années », écrit la FFA dans sa réponse à la consultation.

Selon nos informations, les assureurs envisagent de s’appuyer sur un mécanisme existant, qui était parfois utilisé pour réduire la fiscalité de l’assurance-vie : la participation aux bénéfices différée. Il s’agirait de cantonner une partie des produits financiers générés par les fonds euros bonifiés dans une nouvelle poche investie en actions. Les revenus supplémentaires générés ne seraient distribués qu’aux clients restés un certain temps dans leur contrat. « C’est l’une des hypothèses fortes », confirme Bernard Spitz, le président de la FFA.

« Pas de niche fiscale »
Comme pour tout nouveau produit, l’enjeu pour le secteur sera de convaincre les épargnants. Malgré

un intérêt croissant pour les contrats plus risqués en UC
, ceux-ci restent très attachés à la sécurité des fonds euros. Chargée de défendre les intérêts des épargnants, l’association Faider se montre d’ailleurs « très réservée » sur l’idée de moduler la garantie des fonds euros.
Pour lever ses réticences, les assureurs verraient d’un bon oeil des mesures réglementaires permettant d’encourager le transfert des encours des fonds euros vers les fonds euros bonifié. L’Association nationale des conseils financiers (Anacofi) suggère, elle, d’offrir un « avantage successoral renforcé » aux personnes optant pour l’euro bonifié. « Nous ne demandons pas de niche fiscale », déclare cependant Bernard Spitz (FFA). Le gouvernement a déjà fait savoir que les mesures adoptées dans la loi Pacte ne devraient pas faire déraper le redressement des finances publiques.
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