Le procès contre Standard & Poor’s devait s’ouvrir en septembre 2015. Il n’aura sans doute pas lieu. Car l’agence de notation serait actuellement en train de négocier avec le département de la Justice américaine un accord de l’ordre de 1 milliard de dollars pour solder le contentieux, affirme mardi le « New York Times ». Standard & Poor’s est poursuivi par les autorités américaines pour avoir sous-évalué les risques de certains actifs immobiliers à l’origine de la crise financière de 2008. « Le département de la Justice et plus d’une dizaine de ministres de la Justice (« attorney general ») de plusieurs Etats réclament à S&P plus de 1 milliard de dollars pour mettre fin aux poursuites », a indiqué le quotidien sur son site Internet, en citant des sources proches du dossier. L’enjeu d’un tel procès, s’il avait lieu, ne serait pas mince. Jamais auparavant une autorité fédérale n’a intenté une telle action contre une agence de notation. Si la justice venait à lui donner raison, ce serait toute la ligne de défense des agences – qui invoquent le 1er amendement, sur la liberté d’expression – qui volerait en éclats.

L’Etat fédéral a porté plainte au civil en février 2013 contre la filiale du groupe de médias américain McGraw-Hill, après avoir échoué auparavant à trouver un compromis financier. Il cherchait à récupérer 5 milliards de dollars au nom des investisseurs qui avaient été lésés par des notes trop généreuses. S&P est accusé d’avoir trompé les investisseurs dans ses notations des « subprimes », ces produits financiers adossés à des prêts hypothécaires à risque, dont la plupart étaient garantis par Fannie Mae et Freddie Mac, deux organismes de refinancement immobilier, qui ont reçu près de 200 milliards de dollars d’aides publiques pour éviter la banqueroute. Selon le département de la Justice américaine, l’agence de rating était dans une situation de conflit d’intérêts : elle touchait de juteux émoluments pour son évaluation de produits dérivés.

 
 

Pour être la seule agence de notation poursuivie par l’administration des Etats-Unis, S&P s’est estimé pendant longtemps victime d’une action punitive. Selon l’agence, la plainte était sans fondement et était surtout une mesure de rétorsion suite à son action retentissante de 2011, lorsqu’elle a abaissé la note des Etats-Unis. L’agence de notation avait alors privé la plus grande puissance économique de son AAA pour la première fois de l’histoire.

Cet accord ne règle pas tous les contentieux qui existent. S&P doit affronter d’autres dossiers juridiques portant pour l’essentiel sur ses pratiques d’avant la crise. Sa maison mère a ainsi passé dans ses comptes du troisième trimestre 2014 une provision de 60 millions de dollars pour payer une éventuelle amende à la SEC, le régulateur des marchés financiers américains, « qui devrait être annoncée dans les semaines à venir », assure le « New York Times ». 

Laurence Boisseau, Les Echos