Une fois de plus, en 2014, l’objectif national de dépenses de l’Assurance-maladie (Ondam), soit 178,3 milliards d’euros, sera tenu, affirme-t-on au sein du gouvernement. Mais de justesse. Sa progression sera limitée à + 2,6 %, comme prévu par le comité d’alerte sur les dépenses de l’Assurance-maladie en octobre. Mais cette hausse contenue cache un net dérapage. En 2014, la dépense totale de l’Assurance-maladie a augmenté de 3,3 % en données corrigées des jours ouvrés. Ce ne sont pas des chiffres définitifs. D’ici à mars, plusieurs leviers vont être actionnés afin de rectifier le tir et respecter l’objectif fixé par le Parlement.

Le dérapage initial est dû essentiellement au Sovaldi, un médicament efficace et coûteux contre l’hépatite C. A cause de lui, en décembre, le coût des médicaments inscrits sur la liste des rétrocessions hospitalières (ils sont délivrés à l’hôpital, mais imputés sur l’enveloppe des soins de ville) a quasiment doublé (+ 93 %). Un seul laboratoire en a profité, alors que le reste de l’industrie pharmaceutique s’est serré la ceinture : le poste des médicaments délivrés en ville se replie de – 0,6 % en 2014, après – 0,1 % en 2013, et c’est le seul qui baisse avec les analyses médicales. L’enveloppe financière des produits de santé, bousculée par le Sovaldi, a crû de 4,9 % l’an dernier, contre 1,1 % en 2013.

 
 Mais les données publiées hier par la Caisse nationale d’assurance-maladie ne disent pas tout. Elles ne tiennent pas compte des remises conventionnelles qui vont être accordées par les laboratoires pharmaceutiques en mars. Gilead, le fabricant du Sovaldi, doit rembourser plusieurs centaines de millions d’euros à l’Assurance-maladie, car le prix négocié du Sovaldi (41.000 euros la cure, plus des remises non publiques) est finalement nettement inférieur au prix temporaire de 56.000 euros pratiqué de janvier à novembre. De plus, la loi de financement de la Sécurité sociale a fixé un plafond de 450 millions d’euros de dépenses pour l’hépatite C en 2014, au-delà duquel Gilead doit verser une sorte d’impôt très progressif. Ce plafond a été dépassé et cela coûtera plus de 100 millions d’euros au laboratoire.

L’exécutif va aussi puiser dans les fonds destinés aux hôpitaux ou aux maisons de retraite, et mis en réserve en cas de dérapage. L’enveloppe s’élève à 0,3 % de l’Ondam, et la décision d’affectation sera prise en mars. Cela permettra d’éponger une partie du dérapage des soins de ville. Si, au final, l’exécutif pourra donc se prévaloir du respect de l’objectif, pour la cinquième année consécutive, la hausse prévue en 2015 (+2,1 %) sera très difficile à respecter. 

Solveig Godeluck, Les Echos