Comme attendu, les épargnants ont, en décembre, à nouveau retiré plus d’argent qu’ils n’en ont versé sur leurs contrats d’assurance-vie. La décollecte a même atteint un niveau record, à 3,8 milliards d’euros, selon les statistiques provisoires dévoilées hier par la Fédération française des sociétés d’assurances (FFSA). Alors que les données du mois d’août ont été revues à la baisse, le marché aura finalement subi cinq mois de collecte négative en 2011, du jamais-vu. Encore limité au mois d’août (- 0,3 milliard d’euros), le phénomène s’est accéléré les mois suivants (- 1,8 milliard en septembre, -2 milliards en octobre et – 2,6 milliards en novembre).

Entre une explosion des prestations versées aux assurés (+ 25 %, à 116,4 milliards) et une chute des cotisations encaissées (-  14 %, à 124 milliards), la collecte nette est tombée à 7,6 milliards d’euros en 2011, soit presque sept fois moins qu’en 2010. Le plus gros opérateur du secteur, CNP Assurances, tenait à faire savoir hier qu’il avait eu, lui, une collecte nette positive tout au long de l’année.

Amélioration en vue

Comme le souligne Jean-François Lequoy, le délégué général de la FFSA, « les ménages ont surtout puisé dans leur épargne pour consommer ». C’est le principal motif de rachat (48 %), devant le financement d’un bien immobilier (22 %), porté l’an dernier par un intérêt pour la « pierre » et les ventes de Scellier (22 %). « On n’avait jamais vu ça. La crise du pouvoir d’achat est telle que les Français ont besoin de leur assurance-vie pour finir le mois », abonde un assureur-vie. A 74 %, il s’agit de rachats partiels. Les sommes retirées sont inférieures à 50.000 euros dans 48 % des cas.

La mauvaise passe de l’assurance-vie s’explique aussi par l’attentisme des épargnants face à la situation économique et financière et leur préférence actuellement marquée pour les placements à court terme.« On se retrouve dans une situation qui est assez comparable à celle qu’on avait connue en 2008 »,souligne Jean-François Lequoy. L’assurance-vie n’a ainsi drainé que 40 % du flux des placements financiers des ménages en 2011, contre 60 % en 2010. A l’inverse, les liquidités ont capté plus de la moitié de ces flux.

A entendre la FFSA, il n’y a pas péril en la demeure pour autant. « La collecte nette est positive de 8 milliards d’euros et les encours ont augmenté de 2 % [à 1.362 milliards] », relativise Bernard Spitz, son président, affirmant que « l’assurance-vie reste le produit d’épargne le plus populaire ». Une amélioration de la situation serait en vue. Les premières semaines de janvier laissent à penser « qu’une inflexion est en train de se produire », indique la FFSA, tout en se refusant à donner des prévisions chiffrées pour 2012. Cette tendance serait même « robuste », selon Bernard Spitz.

Si les cotisations en assurance de personnes ont reculé au global de 12 %, à 141,6 milliards d’euros, le chiffre d’affaires total de l’assurance française a affiché une baisse de 9 %, à 189,6 milliards. La bonne tenue des assurances de biens et de responsabilité, qui ont connu leur plus forte progression depuis 2004 (+ 4 %, à 48 milliards) ont permis de limiter la casse. La hausse est plus marquée sur le marché des particuliers (+ 5 %) que sur le segment des entreprises (+ 3 %). Les relèvements de tarifs pratiqués par l’ensemble des acteurs pour rattraper la forte sinistralité des années passées a évidemment joué dans l’augmentation des cotisations d’assurance automobile (+ 4 %) et en multisque habitation (+ 6 %).

En l’absence de catastrophe climatique majeure en 2011, contrairement à 2009 (tempêtes Klaus et Quinten) et 2010 (tempête Xynthia, inondations du Var), la sinistralité s’est améliorée (- 5 %). A 33 milliards d’euros, la charge reste cependant supérieure à celle de 2008. Au global, les résultats techniques devraient être plus équilibrés, indique Jean-François Lequoy. Les assureurs s’inquiètent actuellement beaucoup de la recrudescence des cambriolages.

LAURENT THÉVENIN